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FANNY DUPUIS, POÉSIE BOHÈME ET PHOTOGRAPHIE PROFESSIONNELLE

Chaque mois, nous interviewons un.e photographe de talent. Aujourd'hui, c'est Amaury Welsch, habitué du noir et blanc, qui nous parle de son art !

# Une Photographe à plusieurs casquettes

Fanny Dupuis, du haut de ses 33 ans, est une photographe qui a déjà eu plusieurs vies.

Originaire de la Rochelle, elle commence sa vie professionnelle dans le monde du webmarketing. Une licence LEA et un master en tourisme en poche, elle baroude en Espagne, aux Etats-Unis, en Amérique latine, et là où sa curiosité naturelle l’attire.

Lassée par le monde de la communication, où “les échanges avec les clients ne se résumaient plus qu’à des mails”, elle se décide à vouloir vivre autre chose, autrement.

Et c’est quelques années plus tard que nous la retrouvons sur la terrasse d’un café montpelliérain, à parler d’une passion qui est devenue un métier, la photographie.

# LES DÉBUTS D’UNE PASSION

Si cette Rochelaise est devenue une photographe professionnelle qui commence à être bien implantée dans le milieu, sa première expérience photographique a d’abord été celle de la frustration.

“J’avais 14 ans et on devait partir en voyage latiniste en Italie. On m’avait collé un compact argentique dans les mains, la veille du départ juste avant d’aller me coucher. Je suis revenue avec deux pellicules. Vides. J’étais la seule à ne pas avoir de photos du voyage, et j’étais bien dégoûtée”.

Déçue, elle met la photographie argentique de côté pendant quelques années, et s’amuse à documenter son quotidien avec son premier téléphone et ses photos en 600 x 400 « toutes pourries ».

Son conjoint lui offre son premier appareil, un Reflex Pentax KR, alors qu’elle termine ses études.

“Le fait de déménager, ça te permet de recommencer à zéro ailleurs. Tu te sens neuf. Je me suis dit que si je n’avais pas le déclic maintenant, je ne l’aurai jamais” se souvient-elle.

La jeune photographe débute en couvrant des événements culturels et professionnels, pour se concentrer petit à petit sur le portrait.

Quand tu photographies un portrait, tu as un contact beaucoup plus direct. Il y en a même parfois qui deviennent des amis.
souligne-t-elle avec un grand sourire.

Ce séjour à Boston, c’est aussi le moment où l’argentique refait surface dans sa vie.

Je cherchais un appareil photo argentique, un canon AE1. Je suis tombée sur un Canon AV1, celui avec la priorité ouverture, dans une sorte de friperie à Boston. Je partais en Colombie juste après. Je l’ai testé là-bas et je ne savais même pas s’il marchait. J’ai vraiment beaucoup de souvenirs avec lui.

Dans ce qui pourrait s’apparenter à une revanche personnelle avec sa première expérience photographique, ce renouement avec l’argentique change profondément sa manière de voir le monde.

# LA PHOTOGRAPHIE ARGENTIQUE, UNE AUTRE MANIÈRE DE FAIRE DE LA PHOTO

Dans son quotidien professionnel, Fanny ne peut pas se détacher de son appareil photo numérique.

“En pro, quand tu fais de la photo de famille, ça bouge énormément, tu es obligée de mitrailler un peu. Quand tu essayes de capter le mouvement et que tu as une ouverture à f/1.2, ça bouge vite. J’adore shooter avec de grandes ouvertures. Les plus risquées, mais les plus funs. Je calibre mon appareil avant, mais je suis obligée d’en prendre beaucoup plus” nous explique-t-elle.

Équipée d’un Olympus E-M1 Mark II et d’un EM-5 Mark II en second boîtier, elle reste néanmoins très satisfaite de ses appareils. “Avec Olympus, j’adore le rendu des objectifs. J’adore mon boîtier car il trouve de la lumière là où il n’y en a pas, donc j’ai hâte de voir ce qui va se passer avec le nouveau”.

En revanche, dès qu’il s’agit de partir en voyage et de faire des photos pour son plaisir personnel, elle n’arrive plus à partir sans argentique.

Pour mes balades, mes week-ends, mes vacances, je ne peux plus m’en séparer. L’argentique est devenu prioritaire. Ça me repose de ce que je fais la semaine, ça change. Le fait de ne pas savoir aussitôt, d’oublier ce que j’ai pris et d’avoir cette surprise lorsqu’Arcanes m’envoie les scans. J’aime bien ce côté qui n’est pas instantané justement, cette patience à ravoir. Et ce lâcher prise aussi.

Dans le cadre de sa pratique, elle admet en effet avoir beaucoup de travail en post-prod, avec en tête la volonté d’avoir un rendu parfait, conforme aux attentes de ses clients et à ses exigences.

“Il y a des photos que j’aurais prises au numérique et que j’aurais trouvées moches, tandis qu’en argentique, je les accepte beaucoup plus facilement, comme telles.”

Lorsqu’on lui demande ce qu’elle pense du regain croissant pour la photographie argentique, elle nous répond franchement :

« Ça rend les pellicules vachement plus dures à trouver !

Plus sérieusement, je pense que c’est lié à tout ce côté nostalgie d’une époque un peu révolue, comme il peut y avoir avec les vinyles.

Je pense qu’on est pas mal à avoir cette nostalgique du support.

L’argentique, c’est prendre le temps, mais c’est aussi un objet plus concret, où le relationnel à l’objet est différent. Je connais des gens qui font de la photographie argentique, et qui n’ont pas d’appareil photo numérique, ils ont juste un téléphone. C’est vraiment une pratique à part. Je pense que c’est lié au fait qu’aujourd’hui, tout va très vite, tout est dématérialisé. Et au final l’argentique te permet de te reconnecter à l’action. Tu t’inscris plus dans le présent.”

# PHOTOGRAPHE PROFESSIONNELLE, PRATIQUE SINGULIÈRE DANS UN MONDE MODERNE

Fanny Dupuis est une photographe qui aime varier les plaisirs.

Quand on lui demande s’il est difficile d’être photographe professionnelle en 2022, sa réponse est mitigée : “Quelque part oui, car il y a beaucoup plus de concurrence, et dans le même temps on apprend beaucoup plus facilement qu’à une autre époque. C’est plus facile de s’installer, mais c’est peut être plus difficile de rester”.

Elle poursuit. “J’ai commencé cette année à lancer un petit studio, avec un fond. J’ai de la chance d’avoir un appartement très lumineux. Des fois, je vais chez les gens, sur des lieux de travail. Le bouche à oreille et Instagram me permettent de trouver régulièrement de nouveaux clients.”

Son blog sur la photographie commence aussi à la faire connaître plus largement sur le web.

Par son expérience dans le monde du webmarketing, Fanny combine le regard artistique et l’utilisation de la photographie dans des contextes professionnels.

Ainsi, elle est en mesure de couvrir aussi bien des demandes pour du branding que des missions plus “traditionnelles” comme les portraits de famille ou les mariages.

“Le mariage est devenu l’un de mes sujets préférés. Pouvoir travailler des journées entières, partager les émotions avec les mariés, créer la complicité avant l’évènement, je trouve ça génial. Je suis un peu une éponge. Et c’est juste très très fort. Et je ne pensais pas adorer ça”.

Joaillères, boutiquiers, artistes, Fanny aime également travailler le local et mettre en avant des savoir-faire.

“J’aime avoir les gestes, ce côté manuel de l’artisanat. Montrer le matériel, l’ambiance, l’univers. Ces photos-là, elles vont servir à illustrer leur travail sur différents supports, dans leur communication. Je ne veux pas du packshot sur fond blanc. J’aime faire ressortir l’ambiance d’un lieu.”

# UN MÉLANGE D’INFLUENCES ET D’UNIVERS

Les expériences professionnelles et personnelles, la pratique argentique et numérique, les voyages, les éléments qui ont construit la pratique photographique de Fanny sont nombreux. Et complémentaires.

L’argentique, d’une part, lui a permis de voir les choses autrement, plus posément.

En voyage, je prenais beaucoup de photos avec mon numérique […]. Maintenant, cela m’arrive de cadrer et de ne même pas prendre la photo. Je suis devenue beaucoup plus économe

D’un autre côté, ce contact constant avec la production d’image a profondément modifié sa représentation du monde. Elle s’appuie pour cela sur un exemple, celui de la lumière d’Athènes.

“Ce n’est pas forcément celle où j’ai eu le meilleur rendu, mais j’avais l’impression que quoi que je prenne, le résultat allait me plaire. La lumière était tellement dingue. Une lumière dorée, d’une pureté comme je n’ai jamais revue. Une lumière où j’étais scotchée presque en permanence. C’est très paradoxal. C’est mon meilleur souvenir photographique et en même temps c’est le moment où j’ai le plus relâché. Ces lumières qu’il y avait le soir, c’était magnifique […]. Maintenant, j’ai un regard très différent sur la lumière, et je l’apprécie beaucoup plus”

Quand on lui demande les pellicules qu’elle préfère, elle admet avoir jeté son dévolu sur la Kodak Gold 200. “La première que j’ai testée. J’adore son rendu hyper chaud, et elle est moins sujette à des problèmes d’exposition”. Pour varier les plaisirs, elle s’amuse aussi avec la Portra 160. “J’adore ce côté pastel et doux. Cet aspect un peu aérien, girly.

Dans le même temps, elle concède : “Même en numérique, j’ai retravaillé mon profil colorimétrique pour le rendre un peu plus contrasté et plus doré, à l’image de ces pellicules. Quand j’ai changé le nom de mon entreprise pour me lancer officiellement, j’ai aussi fait évoluer ma palette de couleurs. J’ai ressenti le besoin de changer.”

Aussi bien influencée par des photographes modernes comme Sidonie Vidal, India Earl, Ange Provost ou Greg Finck, que par des peintres comme Rembrandt, Van Gogh ou Caravage, l’univers visuel de Fanny se construit autour de tendances graphiques, de travail sur les polices ou de l’art décoratif.

Curieuse, éclectique, passionnée, Fanny Dupuis oscille sans cesse entre sa passion de la photographie et sa pratique professionnelle. Et pour le meilleur !

Implantée récemment à Montpellier, nous sommes ravis de la retrouver régulièrement dans notre labo et de la suivre activement sur sa page Instagram pour apprécier le reste de son travail.

On espère que cet entretien vous aura plu, et on se retrouve le mois prochain pour une nouvelle rencontre avec nos photographes favoris 😁

Fanny Dupuis Portait numérique avec appareil argentique

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